Rêver d'aventure
Les parallèles entre l'entrepreneuriat impact et les projets d'aventure comme le Vendée Globe sont passionnants.
Hello, voilà la newsletter du Plongeoir #57.
Le Vendée Globe part dans 10 jours. Cette course me fascine depuis que je suis tout petit. Voir ces femmes et ces hommes partir 80 jours seuls autour du monde…
Ça aurait été évidemment abusé d’utiliser Le Plongeoir pour plonger dans cette aventure pour mon propre plaisir. Du coup je l’ai fait, et j’ai adoré ! 🫢
Est-ce que ces projets sont un moyen d’entreprendre et d’avoir un impact social ou environnemental ?
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Pourquoi c’est important ?
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Lire les précédentes newsletters du Plongeoir.
C’est partiiii
Si tu as 1 minute
Constat 🧐 : Le Vendée Globe prendra le départ le 10 novembre. 40 skippers tenteront de parcourir les 45 000 km de tour du monde le plus rapidement possible. L’édition 2020 a été moins rapide qu’en 2016. La nature fixe-t-elle une limite ?
Sujet 🤓 : J’ai été passer 2h avec Benjamin Ferré, un skipper trentenaire qui participera à la course. Les parallèles avec l’entrepreneuriat sont passionnants, de la définition de la raison d’être au produit, en passant par le financement ou la structuration de l’équipe.
Défis 🤔 : De plus en plus de questions se posent. Faut-il continuer de viser la performance quoi qu’il en coûte ? Ou parier plutôt sur des projets plus raisonnés qui peuvent avoir un impact social massif ? Le monde de la course au large vit les mêmes questionnements que la société et c’est fascinant à analyser.
J’ai coécrit cette newsletter avec l’excellent Grégoire Chéron. Son métier est de promouvoir les projets d’aventure, notamment auprès de journalistes.
On plonge ?
Si tu as 15 minutes
Au programme :
Constat : l’humain rêvera toujours d’aventures.
Sujet : parallèles entre l’entrepreneuriat et le Vendée Globe.
Défis : le Vendée Globe, un projet à impact ?
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1. Constat 🧐 : l’humain rêvera toujours d’aventures.
Les grandes personnes aiment les chiffres.
45 000 km : parcours du Vendée Globe. Ça part des Sables-d’Olonne, en Vendée. Ils font le tour de l’Antarctique en laissant sur leur gauche le cap de Bonne-Espérance, le cap Leeuwin et le cap Horn, puis cligno à gauche pour remonter l’Atlantique de nouveau vers les Sables.
74 jours : record du Vendée Globe, détenu par Armel Le Cléach en 2016.
80 jours : temps du vainqueur du Vendée Globe 2020 : Yannick Bestaven. 6 jours de plus qu’en 2016. Pourtant des investissements technologiques massifs ont eu lieu en 4 ans. Des foils beaucoup plus grands par exemple. Certains diront que c’est la faute à la météo. D’autres qu’on arrive aux limites de la nature.
L’édition 2020, c’est le Vendée Globe de tous les superlatifs : plus de bateaux, plus de retombées, plus de sponsors, plus d’histoires de dingue. Pour autant, les bateaux sont allés moins vite qu’en 2016. On a ralenti… et le spectacle n’a jamais été si beau, si excitant. Et si on s’arrêtait un peu là-dessus ?”
Roland Jourdain, marin d’exception et cofondateur de Kairos et Explore
10 millions d’euros : budget de fonctionnement sur 4 ans de Yannick Bestaven. Les budgets varient de 1 à 10. Ces projets sont de sacrées aventures entrepreneuriales.
398 : nombre d’enfants sauvés par une opération du cœur grâce aux courses de l’équipe Initiatives Cœur. Ces projets sont non seulement des projets d’entrepreneurs et de marins, mais ils peuvent aussi avoir énormément d’impact.
Définition
C’est quoi un projet entrepreneurial d’aventure ?
On peut définir l’aventure comme un événement singulier, qui comprend des difficultés, une grande part d'inconnu, de l’extraordinaire, et dont la réussite est douteuse.
En fait il existe deux types de projets d’aventures connus : le sport-aventure, et l’exploration.
Le sport-aventure, c’est la pratique sportive dans un milieu naturel. Ces projets sont souvent risqués à cause de la météo, de la difficulté ou des milieux traversés. Par contre, il y a un encadrement par la compétition. Certains diront même que ça dilue la part d’aventure. Exemples : Paris-Dakar, Vendée Globe où certains ultra-trails comme l’UTMB à Chamonix.
L’exploration est une aventure qui apporte une connaissance à la société, souvent scientifique. C’est le cas de Christian Clot par exemple, qui cherche par ses expéditions à comprendre la capacité d’adaptation de l’humain.
Quelques dates
1500-1700 : explorations terrestres et maritimes. Ces projets étaient motivés par des raisons commerciales, religieuses ou militaires. Le tour du monde de Magellan est peut-être le plus emblématique.
À partir de 1700 : la Terre est de mieux en mieux cartographiée. Nouvel objectif : comprendre la géographie, la biodiversité et les phénomènes naturels. Par exemple, Charles Darwin fait son tour du monde et propose la théorie de l’Évolution.
1800-2000 : les grandes premières. Premier sur un 8000, premier à explorer la fosse des Mariannes, premiers pas sur la Lune, premier au Pôle Sud etc. Les explorateurs repoussent les limites et les gouvernements font de ces premières des outils de prestiges nationaux.
Aujourd’hui : quel doit être le rôle des projets d’aventure ? Des expéditions cherchent à comprendre le dérèglement climatique. Et on rêve toujours autant en suivant ces sportifs et aventuriers qui se surpassent.
Un Vendée Globe est un partage incroyable. J’y ai consacré 20 ans de ma vie. Ça crée du rêve, ça sort du quotidien ceux qui ont besoin d’une fenêtre pour voir plus loin. J’ai eu des centaines de témoignages tellement émouvants. Des maisons de retraite. Des enfants à l’hôpital. Des écoles.
Jean Le Cam, qui participera à son sixième Vendée Globe à 64 ans (!)
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2. Sujet 🤓 : Parallèles entre l’entrepreneuriat et le Vendée Globe.
J’ai interrogé Benjamin Ferré et Grégoire Chéron sur leur vision du lien entre les projets Vendée Globe et l’entrepreneuriat. C’est fou de voir tout ce qu’on peut en ressortir.
Les PME du Vendée Globe
Benjamin Ferré a financé son bateau lui-même. Il a été voir la banque avec des preuves de sponsors signés, et il a obtenu son financement de 1,4 million d’euros. C’est aussi le cas de Guirec Soudée qui a acheté son bateau 1 million d’euros ou de Tanguy Le Turquais qui a acheté le sien 1,2 million par exemple.
Ça te paraît sûrement des gros montants, mais c’est 6 fois moins que les projets qui cherchent la gagne. Tanguy, Guirec, Benjamin mais aussi Violette Dorange par exemple font partie de ces projets à “petits budgets” sur le Vendée Globe.
Ils doivent être à la fois des entrepreneurs et des navigateurs. Au four et au moulin. Ils ont créé les “PME” du Vendée Globe :
Ils doivent être sur le terrain à gérer l’équipe technique, l’admin, la comm, la logistique. Benjamin Ferré a une équipe de 10 personnes en management direct. La préparation à la course arrive en plus de tout ça, pas simple de trouver le temps !
Ils ont dû prendre tous les risques comme des entrepreneurs : financer le bateau avec une banque, se porter caution, payer les salaires. Le fusible financier, c’est eux.
C’est aussi ça qui rend ces projets à petit budget attractifs auprès du grand public. Ils racontent une aventure humaine et accessible à laquelle on se raccroche facilement.
On préfère tous suivre les hauts et les bas des histoires entrepreneuriales, plutôt que celles de ceux qui surperforment au CAC 40. Pareil pour les projets d’aventure.
Si tu veux être entrepreneur, n’oublie pas que ce côté “petit projet qui démarre” est une force. Il faut l’utiliser pour embarquer tout le monde autour de soi. Trop d’entrepreneurs n’osent prendre la parole que quand ils sont parfaits… Alors que c’est l’inverse que les gens veulent :)
Le luxe de pouvoir se concentrer sur sa zone de génie
Dans les équipes de course au large plus professionnelles et plus financées, c’est très structuré. Il y a un investisseur qui finance le bateau et un sponsor qui va se greffer au projet. Le skipper est en fait un pilote pour le bateau.
C’est le cas pour Paprec Arkéa par exemple. Le bateau neuf a été acheté par des investisseurs et les sponsors Paprec et Arkéa. Ils ont choisi Yoann Richomme, un skipper à très fort potentiel, pour le “piloter” et tenter de gagner la course.
L’avantage de ces projets “plus gros” pour les skippers professionnels est d’avoir le luxe de ne se concentrer que sur leur zone de génie :
Tout le management est géré par un “Team manager”. Un skipper exceptionnel est rarement en même temps le meilleur gestionnaire. Tout comme un CEO visionnaire n’est pas toujours excellent manager.
Le risque financier est porté par un investisseur externe ou le sponsor. La charge mentale est beaucoup plus faible pour le skipper, et il peut se concentrer sur un objectif sportif beaucoup plus ambitieux.
C’est pareil pour un entrepreneur qui a suffisamment développé sa boîte ou qui a la capacité de lever rapidement des fonds. Il peut parfois se payer le luxe d’avoir un ou une DG. Ça lui permet de se concentrer uniquement sur sa zone de génie et ce qui peut permettre à l’entreprise de prendre un coup d’avance.
Si tu lances un projet c’est intéressant de se demander : comment m’entourer pour passer un maximum de temps sur ma “zone de génie” ? Là où je sens que je suis le plus performant ?
Le rapport aux fondateurs
Les investisseurs, les salariés, et même parfois les clients rejoignent un projet parce qu’ils croient aux valeurs et à la vision des fondateurs(trices). C’est intuitu personae. Dans les projets d’aventure c’est évidemment le cas. Certains veulent défendre le projet de Jean Le Cam. D’autres de Clarisse Cremer.
Certains projets ont réussi à durer dans le temps parce que leur “marque” s’est développée indépendamment du skipper. Je trouve ça inspirant. C’est le cas par exemple du bateau “Initiatives Coeur”.
Ce bateau est notamment sponsorisé par Vinci ou Kline. Le projet a été lancé en 2009 avec le skipper Tanguy de Lamotte. Il a été tellement puissant qu’il a pu continuer sans Tanguy et permettre à Samantha Davies de prendre le relais. Il a depuis permis de sauver 398 enfants grâce à une opération du cœur. Ce type de projet n’est plus dépendant du skipper, même s’il doit évidemment être parfaitement en ligne avec les valeurs du projet.
Au démarrage d’un projet entrepreneurial, tout le monde embarque pour suivre la vision de quelques personnes. C’est normal. Petit à petit il faut réussir à s’en détacher et rendre le projet moins dépendant de ceux qui l’ont créé.
Le sens des priorités
Quand tu es entrepreneur, tu passes ton temps à être écartelé entre les projets. Tout a l’air super intéressant et utile. L’allocation du temps est une des recettes des meilleurs entrepreneurs.
Je suis extrêmement attentif à l’allocation de mon temps. Je fais un point dessus chaque jour, chaque semaine, chaque mois, pour vérifier que je passe 100% de mon temps au bon endroit.
Stanislas Niox-Chateau, cofondateur de Doctolib
Quand un skipper est seul en mer pendant un Vendée Globe, il est obligé de penser à ses priorités en permanence. Lors d’une course au large en solitaire, tu peux vite te retrouver dans une situation où tu aurais besoin qu’il y ait 10 personnes sur le bateau pour aider, mais c’est impossible.
Tu as la règle des 5R qui dit Route, Réglage, Rangement, Repas, Repos. Tu passes ta vie à prioriser l'un de ces 5R. Parfois, la priorité, c'est d'aller dormir. Même si tu es mal réglé, tu es tellement cramé que tu n'es pas efficace.
Alors, si tu regardes ta semaine et ton agenda de manière froide sur les 3 dernières semaines, est-ce que c’est parfaitement aligné avec tes priorités du moment ?
La vue globale du puzzle
Pour être un bon entrepreneur, il faut être curieux de tout et ne laisser aucune zone d’ombre dans son projet. Il faut être au cœur des équipes chaque jour.
En course au large, chacun a des compétences spécifiques et est bien plus expert que le skipper sur son domaine.
Que ce soit Louise en logistique, Stéphane en technique, Greg en mécanique hydraulique ou Alban sur les ficelles, chacun est bien meilleur que moi sur son sujet.
Le but de Benjamin est de passer un maximum de temps avec eux pour apprendre ce qu’eux savent déjà très bien faire. Son objectif est d’avoir une vision globale du puzzle. Comme pour un dirigeant.
Quand il faudra agir seul sur le bateau dans les mers du Sud, il devra pouvoir comprendre rapidement.
Certaines décisions nécessitent d’avoir la vue globale du puzzle, et doivent être prises par l’entrepreneur. Mais si tu restes au contact d’équipes meilleures que toi chaque jour, elles seront forcément excellentes :)
Avoir un coup d’avance
Les équipes professionnelles qui veulent enchaîner les Vendée Globe doivent sécuriser des sponsors. Ils sont leurs clients.
J’ai appris un truc assez dingue. Une bonne partie des skippers enchaînent les visios lors de leur remontée de l’Atlantique de fin de Vendée Globe, pour sécuriser leurs futurs sponsors.
Pourquoi ? Il n’y a rien de tel que de vendre le projet à des sponsors quand le projet est à son apothéose.
C’est pareil dans l’entrepreneuriat. Il faut lever des fonds quand on n’a pas encore besoin d’argent, ou sécuriser ses clients au moment où la boîte est la plus sexy.
La “raison d’être”
Une course comme le Vendée Globe laisse énormément de marins sur la touche. Des dizaines de skippers très expérimentés n’arrivent pas à trouver de sponsors.
Certains diront qu’il y a désormais ceux qui “savent communiquer” et ceux qui ne savent pas bien le faire. Que Tanguy, Guirec, Clarisse, ou Violette se financent parce qu’ils sont meilleurs communicants que marins.
Pour embarquer des sponsors sur des budgets en millions d’euros, il faut surtout une vraie “raison d’être”. Il faut pouvoir embarquer des milliers de collaborateurs et de clients dans le projet.
Violette Dorange a 23 ans et sera le 10 novembre la skipper la plus jeune à participer à un Vendée Globe. Elle a pu construire son projet autour de cette envie de montrer qu’avec la niaque on peut réussir peu importe son âge.
Tanguy Le Turquais a dédié tout l’espace publicitaire de son bateau à Lazare, et veut embarquer le monde entier derrière cette cause magnifique : redonner de la dignité et une foi en l’avenir à ces personnes qui ont vécu dans la rue.
Il faut créer un véritable alignement entre le skipper qui porte le projet, son engagement, et son client sponsor. Et c’est pareil dans l’entrepreneuriat.
Le “produit”
Tous les skippers témoignent de l’énorme difficulté qu’il y a à trouver les fonds. Pourtant, 90% des sponsors qui étaient présents sur le Vendée Globe 2020 sont de nouveau présents en 2024. Il doit donc y avoir un vrai “Retour sur investissement” ?
Ça veut dire que c’est dur de vendre le produit, mais qu'une fois que les gens l’ont acheté ils en sont hyper satisfaits.
Mais alors c’est quoi ce produit ?
Com interne, souder les équipes et renforcer la culture. Durant les trois ans de préparation, le skipper rencontre les équipes, partage son expérience, et crée une proximité forte. À trois semaines du départ, les salariés peuvent visiter le bateau et le village du Vendée Globe, où 1,5 million de curieux se retrouvent. Pendant les 80 jours de course, tous suivent ensemble le bateau qui porte le nom de leur entreprise ou association, créant un projet commun qui les unit, peu importe leur poste ou leur ville d’origine.
Com externe, valoriser la marque et signer des clients : La notoriété du Vendée Globe est dingue. En plus, associer son image à un skipper et/ou à une ONG valorise l’image du sponsor. Pendant les trois ans de projet, tout est aux couleurs du sponsor, et les médias et réseaux sociaux diffusent les images du projet. À l’approche de la course les interviews se multiplient, et le village du Vendée Globe devient un rendez-vous majeur pour la presse et les clients. Certains sponsors estiment que 75% du sponsoring est ainsi rentabilisé avant même le départ de la course. Évidemment ensuite des millions de personnes vont suivre la course pendant 80 jours.
Il faut savoir définir très simplement quel produit achètent tes clients. Ne pas oublier cet exercice même pour un projet d’aventure.
Le sponsor du jour : Goodvest.
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3. Défis 🤔 : le Vendée Globe, un projet à impact ?
La notoriété d’un projet de sport aventure comme le Vendée Globe est énorme. Elle attire les sponsors, mais ils s’affichent de moins en moins directement et soutiennent de plus en plus des causes sociales ou environnementales.
Vinci et Kline ont part exemple bien compris que c’était plus pertinent pour eux de sponsoriser Initiatives-Coeur que d’avoir un bateau à leurs couleurs.
Évidemment leur marque est beaucoup moins visible. Mais elle est aussi beaucoup mieux valorisée. Les salariés sont évidemment fiers de travailler pour une boîte qui sauve autant d’enfants.
2 courses dans la course, reflet de 2 modèles de société.
Le problème, c’est que ces voiliers de 18 mètres tout en carbone ne sont pas neutres en émissions de CO2, loin de là.
“Au cours des dix dernières années, les performances sur l’eau ont connu des progrès étonnants, mais le prix à payer est élevé. Depuis 2010, l’empreinte d’un bateau a presque doublé, passant de 340 à 550 tonnes d’émissions de gaz à effet de serre.”
Damian Foxall, responsable du développement durable au sein de l’équipe 11th Hour Racing Team
Lors de cette course, il y a deux approches. Comme dans la société.
1/ Les techno-solutionnistes
Certains parient sur des bateaux neufs à foils, toujours plus performants. Ces bateaux coûtent 6 à 7 millions d’euros. Leur objectif est clairement de gagner le Vendée Globe.
Pour eux, la course à l’innovation et à la vitesse permettra un ruissellement des avancées technologiques dans la société. On pourra par exemple se servir des foils pour réduire la consommation des bateaux à moteur ?
C’est pour moi une représentation des avis “Techno solutionnistes” dans la population. “La technologie nous permettra de résoudre nos problèmes. Nos émissions à court terme seront compensées à long terme par les gains qu’elles feront naître.”
Cette philosophie est majoritaire dans la société de manière générale. La croissance économique est encore aujourd’hui l’objectif de chaque pays.
Le Vendée Globe ne fait pas exception. Même si de nombreux projets à impact voient le jour, les émissions augmentent via la course à la performance. Une règle sur ce Vendée Globe a par exemple garanti une place à ceux qui construisaient un bateau neuf.
2/ Les partisans de la sobriété
Une deuxième partie des skippers aborde leur Vendée Globe différemment.
Certains bateaux ont 10 ou 15 ans, et leur “refit” a émis beaucoup moins de CO2 que la construction d’un bateau neuf. Parfois c’est par conviction, parfois c’est juste par manque de moyens. Mais le résultat est le même : des projets plus sobres.
Certaines équipes ont aussi construit un bateau neuf, mais avec une vision différente et passionnante.
Armel Trippon est par exemple en train de construire un bateau issu de carbone déclassé de l’aéronautique. Son approche divise par 2 les émissions de la construction de son bateau. Il veut être sur le départ en 2028.
La vision de Jean Le Cam et d’Eric Bellion est aussi pleine de bon sens :
Ils parient sur un bateau neuf, mais sans foil et plus low tech. Ils pensent que la robustesse peut faire la différence.
Jean Le Cam a prouvé lors de la dernière édition qu’on pouvait finir 4e avec un bateau plus simple, et que les aventures humaines étaient aussi belles (sauvetage de Kevin Escoffier).
« Les foils sont des technologies extraordinaires, mais sur la mer il y a des vagues. Les efforts sont le carré de la vitesse. Quand l’homme a inventé la vitesse, il a inventé l’accident. On ne peut pas aller contre la nature.
On veut aller un peu moins vite, mais plus longtemps. On pourrait parler du lièvre et de la tortue.
Jean Le Cam
Ce qui est aussi super intéressant c’est qu’Eric et Jean partagent tout, des moules du bateau aux plans, en passant par les équipes. Leurs bateaux sont jumeaux. C’est bien plus sobre en CO2, et le collectif génère de la performance. Lorsqu’Eric navigue sur une course, Jean bénéficie de ses retours. Et vice versa.
Je ne suis pas le seul à rêver que Jean réalise une performance hors du commun lors de ce Vendée Globe. Le message serait triple :
On peut toujours se lancer des défis et être performant à 64 ans. Arrêtons de mettre tout le monde au placard à 55 ans.
On peut être performant à moindre coût, et garder une forme d’accessibilité.
On peut avoir un projet plus sobre au niveau environnemental et rester compétitif. Une forme d’alliance avec la nature ?
Ces 15 bateaux à dérive ne seront peut-être pas aux avant-postes, mais il y aura une vraie course parmi eux. Une course dans la course, non officielle et moins technologique mais certainement plus humaine et attachante.
Agir plus, et parler moins.
Il y a un grand paradoxe :
Ces sportifs sont souvent amoureux de la nature. Qu’ils soient surfeurs, traileurs, navigateurs.
Pourtant, les 10 000 traileurs qui courent autour du Mont-Blanc viennent endommager les sentiers. Et les coureurs du Vendée Globe émettent des centaines de tonnes de CO2 pour faire un grand rond dans l’eau.
Beaucoup de marques utilisent la notoriété de ces sports pour être les porte-parole de la cause environnementale. C’est une ligne de crête souvent assez étroite.
Depuis que je fais ce métier, je me questionne sur le rapport coûts / bénéfices des projets d’aventure pour la planète. À quel point, le fait d’aller mener un projet lointain sous prétexte de servir une cause sociale/environnementale/scientifique, justifie la dépense en CO2 ? Certes, il y a l’impact médiatique du projet sur le grand public à travers les livres écrits, les films diffusés, les conférences effectuées, les expositions, etc. Mais cela compense-t-il réellement la dépense en CO2 de l’expédition ?
Certains surfeurs voyagent encore aujourd’hui au bout du monde avec toutes leurs planches en soute pour surfer une seule vague. Ils témoignent ensuite devant les caméras de la fragilité des océans.
Pourtant ces sportifs et aventuriers si proches de la nature sont suivis par le grand public. Ils peuvent avoir un impact médiatique énorme et être des porte-voix. Je comprends par exemple évidemment Team For The Planet qui n’allait pas dire non à toute une partie de la visibilité du bateau de Sam Goodchild…
La dissonance cognitive est grande. Personne n’a encore trouvé la solution.
La stratégie de com des marques sur le Vendée Globe est donc parfois fragile. Par exemple, je ne pense pas que ce soit très fin d’écrire “Go Circular” sur un bateau vert quand on est Holcim, un des plus gros cimentiers du monde. On verra de moins en moins ce type de communication dans le futur, parce que le risque de perception de Greenwashing est très élevé. C’est juste mon avis :)
Un maximum d’impact social
La stratégie que je trouve la plus intéressante finalement sur les projets Vendée Globe est de :
Réduire l’empreinte environnementale dans l’ombre (exemple des projets de Jean Le Cam, Eric Bellion, Benjamin Ferré, etc.)
Communiquer sur une cause plutôt sociale. Duo for a job pour Benjamin Ferré, Lazare pour Tanguy Le Turquais, ou évidemment Damien Seguin (skipper né sans main gauche)
Ce que j’aime dans le Vendée Globe, c'est cette beauté de l'inutile. A priori, ça ne sert à rien de partir tout seul autour du monde sur un bateau. Et pourtant, ça fait rêver. Je trouve ça génial de s’en servir pour des défis sociaux. Aider les enfants à sourire un peu à l’hôpital, changer le regard sur les migrants, ou les gens dans la rue.
Lazare emmène 200 colocs qui étaient avant dans la rue au départ du Vendée Globe. Certains n’avaient jamais vu la mer. C’est magnifique.
Tayeb ému aux larmes en parlant de sa présence sur le stand Lazare sur le village du Vendée Globe. En juillet, après 5 ans dans la rue, Tayeb est arrivé dans nos colocations entre sans-abri et jeunes actifs. On lui a proposé d’être bénévole sur le stand Lazare. Depuis des années personne n’avait demandé à Tayeb le moindre service, et le voilà qui tient le photo box du stand, qui installe la PLV le matin, qui parle de Lazare aux passants curieux.
Pour la première fois depuis des années on lui dit « J’ai besoin de toi ».
Alienor, de l’asso Lazare
On ne peut pas rester insensible au pouvoir de rêve que représentent ces projets pour celles et ceux qui ont besoin de s’évader.
Le Vendée Globe est un exemple emblématique, mais il existe des dizaines d’autres types de projets d’aventure. C’est un excellent moyen d’entreprendre pour avoir de l’impact.
On les passe en revue vendredi prochain !
Voilà, c’est terminé pour aujourd’hui. Merci de nous avoir lus jusqu’au bout.
🙏 Énorme merci à Grégoire Chéron pour la coécriture, et Benjamin Ferré pour l’interview.
Merci aussi à Pierre et sa super newsletter, il m’aide à communiquer ce contenu au plus grand nombre, notamment par Linkedin.
On se retrouve vendredi prochain pour passer à l’action : liste des projets, opportunités de boîtes à créer, et bien évidemment des super vocaux d’expert(es) et d’entrepreneurs.
J’ai deux derniers services à te demander :
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À très vite,
Un grand merci ! Deux articles également inspirés du Vendée Globe :
- https://www.clubarmen.com/blog/performance
- https://www.clubarmen.com/blog/et-vous-quel-est-votre-vendee-globe?categoryId=10676
Merci Guillaume pour ce beau plongeon dans l'aventure avec un grand A. Moi qui n'y connais rien au Vendée Globe, j'ai été happée. C'est passionnant et la comparaison avec l'entrepreneuriat (innovation, esprit d'équipe, leadership, recherche de financements...) est très juste !