Biodiversité : la pierre angulaire de l'humanité
La moitié du PIB mondial dépend de la nature, alors que 75% des terres sont dégradées. Tout va changer.
Hello, voilà la newsletter du Plongeoir #52.
Cette semaine on plonge dans une thématique fascinante : la biodiversité. Si tu croyais que le climat était le sujet le plus chaud du moment, tu risques d’être surpris.
Le sponsor du jour : Wind
Wind est un fonds deeptech qui compte bien secouer nos industries pour qu’elles s’adaptent enfin au changement climatique.
Ils ont bouclé leur premier closing à 130M€ (rien que ça !) en juin. Il est encore ouvert à la souscription, alors si vous cherchez un placement intéressant c’est peut-être le moment !
Ces derniers mois Wind a investi dans Entroview, Eclipse, Sopht, et InSpek, des pépites qui s’attaquent aux défis climatiques en profondeur.
Avec 120 entrepreneurs parmi ses investisseurs, Wind c’est l’ADN entrepreneurial incarné, prêt à soutenir les startups à impact comme il se doit. Ta startup Deeptech serait-elle la prochaine ?
Envie de voir ce que disent les entrepreneurs sur Wind ?
Si ce n’est pas déjà fait tu peux aussi :
Devenir sponsor : Il me reste 2 places en décembre. Il suffit de répondre à l’email pour en parler.
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C’est partiiii
Si tu as 1 minute
Constat 🧐 : Nous vivons une dégringolade aussi rapide qu’au moment de la disparition des dinosaures. La moitié du PIB est directement dépendante de la bonne santé de la nature. Est-ce que cela va tout changer dans nos priorités ?
Sujet 🤓 : La vie des générations futures dépend de notre prise en compte de la biodiversité, et l’économie va être fortement impactée à court - moyen terme. Les lois se multiplient déjà. La bonne nouvelle, c’est que le meilleur moyen d’agir sur le climat, c’est de se battre pour la biodiversité.
Défis 🤔 : Pour embarquer tout le monde, il faut trouver le moyen de donner une valeur à la biodiversité, comme on a donné une valeur au carbone. Il faut aussi pouvoir mesurer les impacts, même si l’indicateur unique est une utopie. Les entreprises peuvent avoir un énorme impact, il faut agir avec méthodologie.
🙏 Énorme merci à Ingrid Vanhée, qui a coécrit ce plongeon avec moi. Ingrid est vraiment impressionnante… Elle aide les entreprises à se poser les bonnes questions en matière de biodiversité et à se retrousser les manches pour passer à l'action. Tu peux la suivre et la contacter sur LinkedIn où elle publie pas mal de contenu à ce sujet.
On plonge ?
Si tu as 15 minutes
Au programme :
Constat : La biodiversité s’écroule.
Sujet : Pourquoi s’intéresser maintenant à la biodiversité ?
Défis : Embarquer tout le monde vers la biodiversité.
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1. Constat 🧐 : La biodiversité s’écroule.
Les grandes personnes aiment les chiffres.
69 % : chute moyenne des populations d'animaux sauvages entre 1970 et 2018. C’est le taux de disparition le plus rapide depuis l’extinction des dinosaures il y a 65 millions d’années. C’est nous les dinosaures ?
150 : nombre d’espèces sauvages qui disparaissent chaque jour. Oui oui, chaque jour. 1 million d’espèces végétales et animales sont menacées d’extinction.
85% : pourcentage des zones humides dans le monde qui ont disparu (ex : marais, tourbières, ou mangroves). Elles ne représentent que 6% de la surface de la Terre, mais 40% de toutes les espèces végétales et animales y vivent.
13% : part des océans qui peuvent encore être qualifiés de sauvages. Les zones de pêche ne cessent de s’étendre.
20% : diminution du risque d’extinction d’espèces grâce à toutes les mesures de conservation mise en place dans le monde. Il faut quand même rester optimistes, tout peut encore changer ;)
Je ne sais pas toi, mais de mon côté j’ai l’impression d’entendre des chiffres d’espèces en extinction depuis des lustres, sans comprendre l’impact.
Dit autrement je sais qu’un monde à +4 degrés est catastrophique, mais je ne comprends pas bien ce que donne un monde à 1 million d’espèces disparues.
Alors on creuse ?
Les grandes personnes aiment aussi les dollars.
50% : part du PIB mondial qui est dépendante de la nature, soit une valeur de 44 trillions de dollars. Si la nature a autant de valeur, pourquoi on n’investit pas plus pour la protéger ?
34 à 48 milliards d’euros : subventions annuelles des Etats membres de l’UE dans des activités nuisibles à la nature (selon WWF). On subventionne donc la destruction de la biodiversité. On part de loin :)
Définition
La biodiversité, c’est tout simplement le vivant. Toutes les formes de vie.
Biodiversité est le mot le plus courant, mais pour beaucoup ça fait un peu savant. Le plus simple est parfois de parler de vivant. Au moins tout le monde comprend.
Alors on inclut quoi dans le vivant ?
Des espèces : multiples plantes, animaux, champignons, mais aussi micro-organismes.
Des gènes : pour chaque espèce, une diversité génétique énorme existe. Comme des chiens à poils longs et à poils courts. On a tendance à penser que 2 cachalots seront toujours identiques, mais c'est évidemment faux.
Des écosystèmes : forets, rivières, récifs coralliens, zones humides. Une rivière par exemple est bien plus complexe qu’on l’imagine. 60% des cours d’eau en Europe sont détournés. Tu te dis probablement que c’est ok, on a juste déplacé l’eau. Mais ça entraîne la disparition d’insectes, d’amphibiens qui s’en nourrissent, mais aussi d’arbres moins irrigués, ce qui accélère l’érosion.
Des humains : et oui, nous sommes une espèce comme les autres, avec une diversité génétique (yeux, couleurs de peau, taille etc.). On a tendance à oublier qu’on fait partie du vivant, tellement on pense le contrôler.
Si on illustre l’histoire de la vie sur un cadran de 24h, les humains n’apparaissent que quelques secondes avant minuit. Un peu d’humilité ne fait pas de mal…
Quelques dates
1948 : création de l’IUCN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature). Leur liste rouge des espèces menacées est la plus complète au monde. Ils sont quand même 11 500 experts.
2012 : lancement de l’IPBES, “le GIEC de la biodiv”. À titre de comparaison, le GIEC a été créé en 1988… Oups, on a un peu de retard.
2021 : création de la TNFD (Taskforce on Nature-related Financial Disclosures) par des acteurs publics autant que privés. Son objectif ? Permettre aux investisseurs de mieux évaluer les risques liés à la nature.
2022 : Pendant la COP15 à Montréal, des objectifs sont fixés. Par exemple 30% des terres et océans protégés d’ici 2030. C’est cool parce que c’est la première fois qu’on pose un chiffre. Et pas cool parce qu’il n’y a aucun moyen de suivre ou vérifier que ça avance…
2023 : mise en place de la loi ZAN (Zéro Artificialisation Nette) en France. La raison ? La superficie d’un département a été artificialisée tous les 10 ans dans notre pays. Dans le monde, 75% de la surface terrestre a été modifiée par l’action de l’humain.
Fin 2023 : mise à jour de la stratégie nationale sur la biodiversité en France. Superbe élan de mesures.
Sept 2024 : le nouveau gouvernement Barnier supprime le secrétariat d’Etat à la biodiversité. Aïe. Les lecteurs du Plongeoir se saisissent du sujet et décident de créer des dizaines de projets pour agir (Oui oui on écrit l’histoire).
Oct 2024 : COP16 sur la biodiversité en Colombie.
Il y a clairement du boulot, mais l’histoire montre que les évènements s’accélèrent. Pendant les dix années à venir on va vivre une explosion du sujet biodiversité.
Ready ?
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2. Sujet 🤓 : Pourquoi s’intéresser maintenant à la biodiversité ?
Pendant longtemps on a eu l’impression que la chute de la biodiversité ne concernait que les fleurs bleues. On était triste parce qu’on assistait sur Arte à l’extinction d’une espèce de panda ou à la disparition d’un ours polaire.
La gravité du sujet biodiversité a dépassé le stade de l’émotionnel. Tellement que certains réfléchissent sérieusement à stocker notre biodiversité sur la Lune. Oups. Creusons les raisons de toute cette agitation.
Notre économie en dépend.
La nature est trop sympa, parce qu’elle rend énormément de services gratuitement. Elle pollinise des fleurs, régule le climat, épure l’eau, fait pousser des arbres et de la nourriture. On appelle ça dans le jargon “les services écosystémiques”.
La moitié du PIB mondial dépend de ces services gratuits, par exemple :
L’agriculture dépend de la pollinisation, de la qualité des terres, des micro-organismes, de l’eau, du climat.
La pêche dépend de la qualité des océans.
La construction dépend du bois et de multiples ressources naturelles.
Physiques : exemple d’un monde agricole qui vivrait sans pollinisateur.
Légaux : les réglementations vont se multiplier.
Réputationnels : une entreprise qui dégrade la biodiversité va finir par faire fuir ses clients.
Difficile de remplacer la nature.
Pour protéger nos business, certains pensent que la technologie peut reproduire ce que la nature fournissait gratuitement.
Le meilleur exemple est l’agriculture :
Une fraise pousse toute seule en pleine terre, grâce à des ressources orchestrées avec magie par Mère nature : eau, lumière, minéraux.
S’il devient difficile de produire suffisamment, on peut avoir envie de recréer la nature nous-même. Je suis bien placé pour le savoir, puisqu’on avait levé 30 millions d’euros avec Agricool pour cultiver dans des containers fermés au cœur de la ville.
Tout ça part souvent d’une bonne volonté. Dans le cas d’Agricool, l’idée était de permettre aux habitants des grandes villes de manger local, en cultivant dans des sous-sols et parkings inutilisés.
Mais remplacer la nature par de la technologie a de nombreuses limites :
La biodiversité est bien plus complexe que ce qu’on croit.
C’est extrêmement cher et consommateur d’énergie de vouloir reproduire ce que la nature fournit gratuitement.
Beaucoup de solutions existent pour pouvoir pallier artificiellement à la chute de la biodiversité :
Robots pour polliniser les fleurs
OGM pour bénéficier de variétés de tomates qui résistent à toutes les attaques
Viande cellulaire
Digues pour éviter les inondations dues à la suppression de haies ou à l’érosion des sols.
Il ne faut pas jeter la technologie avec l’eau du bain, mais soyons prudents.
Peut-être faut-il accélérer le biomimétisme pour s’inspirer du vivant, plutôt que chercher à le remplacer ? Comme FinX qui s’inspire des nageoires de poissons pour créer des moteurs électriques de bateaux plus économes ?
Restons humbles : nous ne comprenons pas grand-chose au monde vivant. Les bactéries et les microbes font évidemment partie de la biodiversité. Je trouve cet exemple très parlant :
On a calculé qu’il y aurait sur la planète entre 4 et 6 mille milliards de milliards de milliards de bactéries. Concernant le nombre d’espèces de microbes, c’est pire : on ne sait pas. Les estimations vont de quelques dizaines de millions à 1 000 milliards. Or, on peut en cultiver seulement quelques milliers. C’est dire combien ce monde est méconnu.
Notre vie en dépend.
Il n’y a pas que le business dans la vie, il y a quand même la vie aussi.
Tout ce qui nous entoure provient des ressources naturelles : nourriture, eau, vêtements… Même les médicaments comment la morphine ou la codéine viennent à l’origine de substances naturelles.
Parmi les services que la nature rend gratuitement, il ne faut pas oublier la culture et la qualité de vie. Un footing est quand même moins ressourçant sur un parking que dans la nature.
Last but not least comme disent nos copains anglophones, la perte de biodiversité est aussi le principal moteur des épidémies de maladies infectieuses...
La biodiversité nous aide à agir sur le climat.
Quasiment tout le monde priorise les objectifs “climat” aux objectifs “biodiversité”. On prend peut-être le sujet dans le mauvais sens.
Agir pour la biodiversité peut permettre d’atteindre plus rapidement les objectifs climat.
L’effondrement de la biodiversité aura des conséquences bien plus rapides que le changement climatique (même s’il ne faut pas les opposer : ces deux crises se renforcent mutuellement).
La solution est simple : investir là où on gagne sur tous les tableaux.
Si tu cherches à résoudre un seul des problèmes (le climat), tu peux en dégrader potentiellement un autre (la biodiversité, l'eau, etc.).
Par exemple, tu peux décider d’investir dans la conservation des tourbières. Ces zones humides disparaissent à hauteur de 500 000 hectares par an dans le monde.
Pourquoi les tourbières ?
C’est un strike environnemental mixant carbone, biodiversité et gestion de l’eau en une fois. 3 en 1 comme on dirait chez L’Oréal.
Biodiversité : tu fournis un habitat à des milliers d’espèces qui y vivent.
Eau : tu diminues les inondations en régulant le débit des rivières et tu améliores la qualité de l'eau.
Carbone : les tourbières contiennent environ 30% du carbone terrestre stocké dans les sols, malgré leur faible surface (environ 3% de la surface terrestre).
Il y a beaucoup d’autres exemples que les tourbières, comme l’agroécologie par exemple.
La biodiversité nous aide à faire face au réchauffement.
Les arbres créent des microclimats plus frais lors des canicules. Les récifs de coraux et la mangrove protègent les côtes contre les vagues et les tempêtes.
C’est aussi le cas des haies dans les champs. 70 % des haies ont disparu en France depuis 1950. De nombreux agriculteurs en replantent et l’impact est multiple : stockage du carbone, refuge pour la biodiversité mais aussi rempart face aux inondations et vents forts.
Jusqu'à récemment les crédits carbone étaient monomaniaques. On voit aujourd'hui apparaître des crédits plus chers qui comprennent un "bonus biodiversité". Super nouvelle.
Ingrid (qui a a co-écrit ce Plongeon avec moi) va publier ces prochaines semaines de nombreux posts sur le lien entre biodiversité et climat : suis-là comme moi sur Linkedin.
La réglementation va nous tomber dessus.
Le légal est un gros sujet… Et pas des plus sexy pour être honnête.
Ce qu’il faut retenir c’est que la pression monte énormément, par exemple avec la CSRD. Toutes les entreprises de plus de 250 salariés et 40M€ de CA devront analyser leurs impacts biodiversité dès 2025.
Tout le monde se mélange un peu les pinceaux entre TNFD, SBTN, CSRD (chic, des acronymes !) mais aussi taxonomie européenne.
Tu trouveras plus de détails ici si ce sujet te concerne.
Le sponsor du jour : Wind
Wind est un nouveau fonds Deeptech de 130M€, créé en juin.
Ils ont déjà investi dans les pépites Entroview, Eclipse, Sopht, et InSpek.
Envie de voir ce que disent les entrepreneurs sur Wind ?
3. Défis 🤔 : Embarquer tout le monde vers la biodiversité.
Donner une valeur au vivant
Dans notre société tout ce qui n’a pas de prix n’a pas de valeur. Mais comment valoriser la biodiversité ?
On considère encore qu’on peut puiser indéfiniment et gratuitement dans un stock de ressources naturelles pourtant limité. C’est certain que ça changera.
Si on voulait stopper la destruction de la biodiversité d’ici 2030, il faudrait rediriger des centaines de milliards de dollars vers des projets qui préservent la nature.
Ces projets pourraient bénéficier de certificats biodiversité, et valoriser leur impact positif. Ils pourraient les vendre sur les marchés à d’autres entreprises, forcées d’en acheter parce que trop impactantes sur la biodiversité.
Carbone4 vient de pondre un excellent rapport sur le sujet, et des projets comme Landbanking Group et OBC sont vraiment passionnants à suivre.
On en est encore aux prémisses d’un modèle de financement de la restauration de la biodiversité. Dans tous les cas, il faut faire très attention aux dérives de la compensation :
La destruction d'une zone humide en Pologne n'est pas "compensée" par la réintroduction de vautours dans les Alpes. Un hectare de forêt supprimé sur Bornéo n'est pas vraiment "compensé" par plus de haies ou moins de phytosanitaires dans un champ français. Plus encore que pour le climat, la "compensation" est invalide en matière de biodiversité.
Jean-Marc Jancovici, sur Linkedin.
Pour valoriser, il faut mesurer
Si on crée des certificats biodiversité avec une valeur en face, il faut pouvoir mesurer les impacts. La tonne de CO2 est l’indicateur sur le carbone. Comment faire pour la biodiversité ?
Quelle est LA bonne unité de mesure ? Il y a des tonnes de domaines avec lesquels il faut composer : terres, eaux douces, océans, espèces animales et végétales… Et ces domaines sont eux-mêmes subdivisés en de multiples sous-domaines.
Bon courage si tu veux calculer combien de séquoias valent une baleine.
Des centaines de scientifiques cherchent à trouver un indicateur unique qui permettrait à la biodiversité d’être mieux intégrée dans le monde économique.
Il existe beaucoup d’indicateurs, mais ne peut être généralisé. Par exemple, l’IPV (Indice Planète Vivante) du WWF ne concerne pas toutes les espèces.
Le Global Biodiversity Score de CDC Biodiversité est intéressant à suivre dans sa méthode je trouve. Il utilise l’unité de mesure MSA.m².
MSA vient de “Mean Species Abundance” (Abondance Moyenne des Espèces).
Si tu as un impact de 1 MSA.m², ça veut dire que tu as transformé un mètre carré d’un espace naturel intact (par ex de forêt vierge) en un espace totalement artificialisé et sans vie (par ex de parking goudronné).
C’est encore une fois un indicateur intéressant mais qui ne peut pas être généralisé parce que trop limité.
En fait, c’est assez logique de ne pas trouver d’indicateur unique :
Demandez à votre médecin quel est l’indicateur unique statuant de votre bonne santé : est-ce la température corporelle ? Le nombre de globules rouges ? Le pouls ?
Si votre thermomètre affiche un glorieux 37 degrés mais que vous venez de vous faire percuter par un SUV, peut-on vous considérer en bonne santé ?
Ingrid Vanhée, sur Linkedin
Les médecins ne passent pas leur journée à trouver un indicateur unique, ils apprennent à appréhender chaque situation sur le terrain.
C’est pour ça que le SBTN a été créé. C’est une approche méthodologique, pas un indicateur unique.
Il faut ensuite faire confiance à ceux qui connaissent les sujets sur le terrain. Est-ce qu’une espèce est localement menacée de disparition ?
Certaines startups cherchent à remonter les informations les plus précises possible sur la biodiversité, pour que la mesure soit pertinente. C’est le cas de projets à gros potentiel comme Pivotal (UK) ou Darwin (France).
Remettre le vivant au cœur des priorités
Innover dans le statut juridique du vivant
Le droit de la nature est un sujet dont on parle moins dans les sphères business mais qui est intéressant. Tu trouveras une analyse du Monde ici.
Le Costa Rica a même ancré la protection de l'environnement dans sa Constitution.
Changer nos modes de consommation
On mange beaucoup trop de viande, et on gaspille de la nourriture :
40% des surfaces habitables sur terre servent à l’élevage et 70% des oiseaux sont des poulets ou de la volaille.
Un tiers de la nourriture produite sur terre est jeté.
Tout cet espace de production agricole pourrait être moins sous pression pour aider à restaurer la biodiversité.
Protéger
Restaurer c’est bien (et nécessaire !) mais c’est plus coûteux que de protéger les espaces qui peuvent encore l’être.
L’exemple du Parc national de Port Cros est génial. Depuis la création de l’aire marine protégée en 2007, les quantités de poissons n’ont fait qu’augmenter.
Le gros problème c'est que protéger ça ne se voit pas. C’est super difficile de trouver des financements. Les humains aiment les inaugurations, les travaux, les chantiers : ça montre qu'on se bouge, qu'il y a de l'activité.
L’exemple qui me fait le plus sourire vis-à-vis de l’humanité à ce sujet est celui de la startup Colossal. Ils cherchent à faire renaître le Mammouth disparu 🙃. C’est bien plus sexy que de laisser la nature tranquille.
Pour protéger la biodiversité, certains utilisent le PSE en France : “Paiement pour Services Environnementaux”. C’est surtout utilisé dans l’agriculture. Dans la métropole de Chartres par exemple des agriculteurs sont rémunérés pour maintenir des prairies. Ça permet de maximiser la biodiversité et d’améliorer les paysages, et ça compense la baisse de revenu chez l’agriculteur.
C’est tellement compliqué de convaincre de laisser la nature au calme, que le fondateur de The North Face et sa femme s’étaient lancé la mission d’acheter plus de 2 millions d’hectares d’espaces sauvages en Amérique du Sud, juste pour créer des parcs nationaux et les offrir à l’Etat.
Restaurer
Une fois qu’on s’est dit que c’était mieux de commencer par protéger, restaurer reste superbe.
En mer d’Indonésie l’ONG française Coral Guardian a restauré plus de 50 000 récifs coralliens avec l’aide de citoyens. 90% des récifs coralliens risquent de disparaître d’ici 2050, et la solution viendra certainement d’une somme d’actions locales.
C’est hyper cool de voir que la nature est résiliente : si on ne dépasse pas un certain seuil de non-retour elle peut se reconstituer.
Alors quel lieu naturel pourrait être protégé ou restauré autour de chez toi ?
Transformer nos lieux de vie
Plus nous sommes connectés au vivant, plus nous voudrons le protéger.
Le meilleur exemple en France est peut-être la biovallée, dans la Drôme. Une initiative locale pour faire de ce territoire un exemple en matière de durabilité, intégrant les entreprises, agriculteurs et habitants.
Les villes aussi peuvent devenir des lieux de nature. Les Nations Unies prévoient 68 % d’habitants en ville d'ici 2050.
À New York 4 000 hectares de zones naturelles sont préservés dans les limites de la ville, avec 26 types d'habitats distincts. NY abrite plus de 2 000 espèces de plantes, 200 espèces d'arbres, 200 espèces d'abeilles. En 2023, le Conseil de la ville de New York a adopté un projet de loi visant à atteindre une couverture de 30 % d'arbres. La superficie de Central Park est quand même supérieure à celle de la Principauté de Monaco !
Utiliser la puissance des entreprises
Les boîtes vont devoir passer à l’action, par conviction ou obligation. Il ne faut surtout pas paniquer devant l’ampleur de la tâche et être méthodique.
La base : mesurer.
Tout commence par la mesure, comme expliqué plus haut. Elle sera imparfaite au début mais permettra de fixer un cadre et devra être améliorée d’une année sur l’autre.
La suite logique : sécuriser sa chaîne de production.
Il faut s’intéresser à ce qui est vraiment au cœur du modèle de l’entreprise. Ikea doit commencer par mieux gérer sa ressource bois, pas par mettre en place une gestion raisonnée des bacs de fleurs sur ses parkings.
Toutes les boîtes bien gérées analysent leurs risques fournisseurs.
C'est la même chose avec la nature : si tu réalises que tous tes produits dépendent du bois par ex, tu as intérêt à faire en sorte que ton fournisseur (la nature) ne se casse pas la figure !
La grande classe : devenir pionnier de la biodiversité.
Tu peux aller plus loin et devenir une inspiration pour les générations à venir :
Fixer un prix interne à la nature. La moitié du PIB dépend de la nature (44 trillions de dollars), combien ça représente dans ta boîte ? L’objectif pourrait être ensuite de diminuer cette dépendance au “fournisseur Nature”.
Kering a par exemple mis en place depuis plusieurs années un “Environmental P&L”.
Rendre la nature actionnaire de l’entreprise. Patagonia verse environ 100 millions de dollars par an de dividendes à son seul actionnaire : la nature. Ce profit est distribué à de multiples associations locales et expertes.
Tu peux transformer ton business model, pour le tourner vers la préservation des écosystèmes. C’est le cas des entreprises régénératives comme Pocheco qui fabrique des enveloppes dans le Nord.
Attention au greenwashing
Le spot de pub d’Apple de l’année dernière avec Mère Nature a fait un tollé.
On y voit le comité de direction justifier de tous ses choix environnementaux de manière caricaturale.
Beaucoup ont l’ambition de devenir “Nature positive”. C’est un peu la suite du “Net zéro” ou “Carbon Neutral” que les boîtes visaient quand on ne suivait que le sujet carbone au niveau environnemental.
Devenir “Nature positive” c’est non seulement diminuer l’empreinte environnementale mais également investir pour restaurer ce qui a pu être détruit.
C’est un superbe objectif, mais attention aux effets d’annonce. Personnellement j’ai mon petit radar à greenwashing : si on ne parle que d’impact positif, et qu’on ne décrit jamais d’éléments à améliorer : hic.
Il faut être très prudent vis-à-vis de la communication de ces nouveaux projets, et commencer par avoir un réel impact avant de s’en servir pour communiquer.
Voilà, c’est terminé pour aujourd’hui. Merci de nous avoir lus jusqu’au bout.
🙏 Énorme merci à Ingrid Vanhée, qui a co-écrit ce plongeon avec moi. Tu peux la suivre et la contacter sur LinkedIn où elle publie pas mal de contenu sur la biodiversité.
Merci aussi à Pierre et sa super newsletter, il m’aide à communiquer ce contenu au plus grand nombre, notamment par Linkedin.
On se retrouve vendredi prochain pour passer à l’action : liste des projets déjà lancés, idées de jobs, opportunités de boîtes à créer, et bien évidemment des super vocaux d’expert(es) et d’entrepreneurs.
J’ai deux derniers services à te demander :
Mets un petit like / commentaire avec ton ressenti :)
Si tu as trouvé cette newsletter utile, partage-la. C’est uniquement comme ça que ce projet grandit.
À très vite,
Bonjour,
je suis abonné au plongeoir depuis quelques semaines et j’apprécie vraiment de vous lire ! Vous l'avez peut être déjà fait, mais ça serait intéressant que vous creusiez le sujet de la consommation de viande . Dans cette newsletter vous indiquez que l'on mange "beaucoup trop de viande" et quelques lignes en dessous vous mettez en avant l'importance de "maintenir les prairies"; mais maintenir une prairie ne peut se faire sans élevage de ruminants. Ce sujet est malheureusement trop souvent traité avec beaucoup de manichéisme dans les média ce qui renforce idéologie et culpabilité. Ce que l'on peut croire comme vertueux : "je ne mange plus de viande rouge car ça émet trop de GES" peut aussi entrainer des effets très négatifs comme la contribution à la perte de biodiversité ! J'apprécierai d'avoir votre regard sur ce sujet complexe mais au cœur de pas mal d'enjeux (environnement, économie, culture, ...)
Merci beaucoup pour ces informations très complètes ! Nous sommes totalement alignés sur les constats et le travail à mener, chez EcoTree. C'est pourquoi nous avons rejoint l'organization for biodiversity credits afin de contribuer à déterminer la valeur des crédits de biodiversité et ce qu'ils doivent prendre en compte.
C'est aussi pourquoi nous menons depuis des années des projets de préservation et de reconstitution de nos écosystèmes en France et en Europe, persuadés qu'il faut commencer par balayer devant notre porte. Ce, en emmenant avec nous le plus d'entreprises possible car elles ont un rôle primordial à jouer. La biodiversité doit être considérée dans son ensemble. En ce domaine comme en d'autres, la compensation pose effectivement une question majeure : peut-on réparer ici ce que nous avons détruit là ? A priori non. Donc il faut éviter et réduire. Mais aussi contribuer car il y a du pain sur la planche pour restaurer tout ce que nous avons dégradé. Merci donc pour cette passionnante lettre d'information !
www.ecotree.green